Trois portraits de la colère chez les jeunes adultes.

Notice bibliographique

Pickard, S. et Van De Velde, C. (2021). Trois portraits de la colère chez les jeunes adultes. Dans T. Chevalier et P. Loncle (dir.), Une génération sacrifiée? (p. 57-69). Presses Universitaires de France.

Résumé

La jeune génération contemporaine a connu le néolibéralisme et une série de crises depuis son enfance. On peut citer notamment la crise financière de 2007-2008 et ses retombées en termes de politiques d’austérité qui touchent particulièrement les jeunes dans plusieurs arènes : l’éducation, le logement, le travail, la santé physique et psychologique, et les loisirs. La crise écologique est venue, pour beaucoup, renforcer les sentiments d’angoisse et de peur pour l’avenir, à la fois au niveau planétaire et individuel. Depuis le printemps 2020, s’ajoute la crise sanitaire qui a profondément bousculé la vie des jeunes de tous âges.

L’accumulation de ces crises prolonge encore la transition vers l’autonomie et la vie adulte. Comparativement aux générations plus âgées, le processus de déclassement s’accentue et crée des inégalités générationnelles importantes. Ces inégalités, incertitudes et précarités sont à l’origine de fortes émotions parmi les jeunes générations : la peur, la détresse, l’incertitude, mais aussi l’espoir, la révolte, ou encore la colère. La conviction d’être délaissés par les élites politiques et l’action publique se traduisent chez de nombreux jeunes par une défiance accrue envers les élus et par l’impression de plus en plus partagée que la voix des jeunes n’est pas écoutée et que l’avenir des jeunes citoyens n’est pas pris en compte.

Cette colère est à l’origine de changements notables dans la participation des jeunes générations, et dans ce chapitre, nous allons montrer comment elle peut agir comme une force mobilisante au niveau politique. D’une part, dans le rapport aux urnes, elle participe d’une montée de l’abstention et d’une polarisation des votes vers les partis plus radicaux et « antisystèmes ». D’autre part, dans la conduite même des existences, on note une tendance croissante à l’expression politique par la manière de vivre sa vie – la façon dont on s’habille, mange, voyage etc. Il y a un lien étroit entre la politique par le style de vie et la politique identitaire quand on se définit par son positionnement face aux questions spécifiques (écologie, parité, égalité, racisme) et non pas aux idéologies politiques traditionnelles. Enfin, en ce qui concerne les actions politiques non-électorales, on observe que les jeunes générations – en particulier les jeunes urbains, étudiants ou diplômés – se sont intensément mobilisées ces dernières années : si la peur diminue la protestation, la colère, elle, l’augmente. La colère peut donc agir comme un catalyseur de mobilisation. Or, les nouvelles technologies numériques, dans des espaces mondialisés, offrent davantage de capacité d’action à cette génération qui n’hésite pas à faire entendre sa colère dans le débat public, et à favoriser l’horizontalisme aux partis politiques traditionnels. Cet engagement politique peut offrir des émotions positives de camaraderie, de partage et de joie, de ne plus sentir seul.e, ou de trouver un foyer collectif : en bref, elle peut redonner de l’espoir. Afin de mieux comprendre ces multiples chemins politiques de la colère au sein des jeunes générations, nous explorons, dans la suite de ce chapitre, trois portraits de jeunes qui expriment leur révolte, et la façon dont celle-ci va s’exprimer et se manifester dans l’espace public.

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Publication du membre

Sarah Pickard
Cécile Van de Velde
Patricia Loncle

Appartenance aux volets

Année

2021